Coup de projecteur sur le Venezuela
Le directeur de la CIA, Michael Richard Pompeo a révélé récemment la tenue d’une série de réunions avec la Colombie et le Mexique pour évaluer les manœuvres qui pourraient être mises en œuvre depuis ces nations pour imposer un changement de gouvernement au Venezuela (1). Depuis des mois des paramilitaires colombiens passent la frontière et font des incursions en territoire venezuelien pour y commettre des actes terroristes et s'adonner à la contrebande.
Barak Obama avait le 9 mars 2015 signé un décret qualifiant le Venezuela de "menace inusuelle et extraordinaire à la sécurité nationale et à la politique extérieure des États-Unis ".
Comme elle le fait dans tous les pays où les États-Unis veulent asseoir leur leadership, la CIA finance l'opposition venezuelienne sous diverses couvertures : l'USAID, la NED ...qui se définissent comme des organisations non gouvernementales (ONG) humanitaires.
Pourquoi les États-Unis s'acharnent-ils contre le Venezuela ?
* La première raison est économique. Le Venezuela possède les plus importantes réserves mondiales - prouvées - de pétrole et jusqu'alors les États-Unis importaient depuis ce pays 1/3 de leur consommation. Trajet de 4 à 5 jours contre 40 à 45 depuis le Moyen-Orient, ce qui réduit considérablement les coûts de transport. Exxon Mobil veille avec son PDG Rex Tillerson, secrétaire d’État de Trump.
* La deuxième raison est idéologique : depuis 1998 et l'élection de Hugo Chavez, le gouvernement du Venezuela de gauche progressiste est favorable aux classes populaires. Il est proche de Cuba. C'est pour les États-Unis un très mauvais exemple qu'il faut éradiquer....
* La troisième raison est stratégique. Dès son arrivée au pouvoir, Hugo Chavez a entrepris de réactiver l'OPEP ( Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) afin de faire remonter le prix du baril tombé très bas - en 1998 moins de 10 dollars -. Puis il reprend le projet de Simon Bolivar d'une "Grande Colombie" en mettant sur pied des alliances et des accords d'intégration avec les pays voisins ( UNASUR, CELAC, ALBA, Petrocaribe...) (2) . Il met en échec le projet étatsunien d'un accord de libre-échange ( ALCA ou ZLEA)(3) de l'Alaska à la Terre de Feu et en contre partie il crée l'ALBA, traité de coopération économique équilibré entre le Venezuela, Cuba, la Bolivie, le Nicaragua, l'Équateur, San Vicente et les Grenadines, Antigua-et-Barbuda .
Pourquoi cette haine de l'opposition envers le président Nicolas Maduro ?
C'est une haine de classe : Nicolas Maduro est un homme du peuple. Ancien chauffeur de bus puis leader syndical, il est élu député en 1999 et devient président de l'Assemblée Nationale. Il est ensuite ministre des Affaires étrangères puis vice-président de la République en 2012. A la suite du décès de Hugo Chavez il devient président par intérim puis remporte les élections qui suivent en avril 2013 avec 50,6% des voix. La bourgeoisie de Caracas déteste ce Président pourtant élu démocratiquement et aspire à un changement de régime pour retrouver ses privilèges ; ce qu'elle n'a pas réussi à obtenir du temps de Chavez car celui-ci bénéficiait d'un fort soutien populaire, elle espère bien l'obtenir aujourd'hui d'autant que la chute des cours du pétrole ont obligé le gouvernement Maduro à pratiquer une politique sociale moins généreuse.
N'ayant pas réussi à gagner les élections présidentielles, elle a organisé la pénurie. C'est dans la rue que cette opposition pense arriver à ses fins. Précisons que l'opposition de droite et d'extrême droite se concentre dans quelques quartiers de Caracas - les plus aisées - ( Chacao, Altamira), dans quelques municipalités de droite et dans les zones frontalières avec la Colombie. Le chaos n'a nullement envahi tout le pays. Les appels à la grève générale n'ont pas été suivis.
Pourquoi tant d'informations mensongères dans (presque) tous nos médias ?
On entend à la radio ou à la TV que les manifestations ont provoqué la mort de 120 personnes depuis avril : mais qui sont ces morts ? leur identité ? qui les a tués ? Si les journalistes ne précisent rien, c'est pour inciter les auditeurs à penser que les forces de l'ordre tirent sur des manifestants pacifiques, ces "combattants pour la liberté"! Or la majorité des victimes a été causée par les violences de l'extrême droite et les quelques "bavures" policières (une vingtaine) ont été durement sanctionnées par le pouvoir. Il faut à ce propos, rappeler que les forces de l'ordre au Venezuela ne sont pas équipées d'armes létales.
Entendu sur France-Inter : "Les sbires de Nicolas Maduro ont riposté..." Pourquoi utiliser ce mot "sbires" et non "forces de l'ordre" ou "policiers" ? Tout est fait pour discréditer l'adversaire de classe.
Ainsi Nicolas Maduro voudrait instaurer une dictature ! Comment ? En organisant l'élection au suffrage universel d'une Assemblée Constituante ! En soumettant cette nouvelle constitution à un référendum ! Voilà les méthodes autoritaires de Maduro qui vont conduire à la dictature ! C'est risible ! Maduro n'est pas Pinochet ! Que l'on nous cite des "dictateurs" qui ont organisé autant d'élections et de référendum que Chavez et Maduro !
L'opposition clame qu'elle ne reconnaîtra pas cette Assemblée car le procédé serait illégitime. L'article 347 du Chapitre III de l'actuelle constitution dit : " le peuple du Venezuela est le dépositaire du pouvoir constituant originaire. Il peut convoquer une Assemblée Nationale Constituante avec l'objet de transformer l'État, créer un nouvel ordre judiciaire et rédiger une nouvelle constitution."
Quand on voit l'Union européenne emboîter une fois de plus le pas à la rhétorique de Washington et déclarer qu'elle non plus ne reconnaîtra pas la nouvelle Assemblée venezuelienne, on peut s'interroger une nouvelle fois, sur sa conception de la démocratie et de la souveraineté des États.
Malgré le boycott de l'opposition, malgré les pressions médiatiques, malgré les menaces de toutes sortes, malgré le danger, malgré deux assassinats de personnalités dont celui d'un candidat à son domicile, les citoyens sont allés voter : 8 millions de votants !
(2) UNASUR : Union des nations sud-américaines
CELAC : Communauté d'Etats Latino-Américains et Caraïbes
ALBA : ALliance Bolivarienne pour les peuples de notre Amérique.
Alba signifie aube en espagnol : tout un symbole....
(3) ALCA en espagnol, ZLEA en français : Zone de Libre échange des Amériques