Le MS21 et les gilets jaunes

Publié le par MS21

Le MS21 et les gilets jaunes

Le MS21 et les « gilets jaunes »

 

Depuis une semaine, le pays est en proie à des convulsions dont l’ampleur et le caractère spontané ont sidéré la classe politique dans son ensemble y compris dans les zones éloignées des métropoles, mais également les syndicats et leurs dirigeants et bien entendu l’oligarchie financière et la bourgeoisie compradore.

 

Ecologie ou politique fiscale inégalitaire ?

 

La réalité

 

Qu’on y regarde d’un peu près : la réalité saute aux yeux. Au congrès des maires, contre toutes leurs attentes et malgré ses engagements, Macron se défile. Il invite certains de ces maires à un dîner à l’Elysée, invitation à laquelle bien sûr un certain nombre a répondu. Quant aux autres, et peut-être les mêmes, ils protestent avec autant de constance que d’inefficacité depuis des mois, voire des années… ils protestent contre la situation faite aux territoires et plus particulièrement à ces territoires ruraux éloignés des métropoles. Qu’ils se lamentent ou qu’ils y prêtent la main, qu’est-ce que cela change ? Depuis bien longtemps, dans ces territoires, il n’y a pas ou plus de transports en commun, la poste a disparu, les écoles regroupées imposent aux enfants des heures de transport épuisant, les services publics, les commerces, les médecins sont absents. Déserts économiques, déserts sociaux, déserts culturels… Il faut bien prendre sa voiture pour faire les courses, aller à un rendez-vous ou emmener les enfants participer à des activités ; ne parlons pas du cinéma, du théâtre, des concerts …

 

Des territoires délaissés

 

Au 1er Janvier 2018 la France compte 22 Métropoles. Selon la DGCLI (Direction générale des collectivités locales et de l’intercommunalité) ces métropoles regroupent 39 % de la population, 43% des emplois et 51% du PIB national. Les chiffres parlent d’eux mêmes. Plus de 60% de la population vit hors des métropoles qui concentrent pourtant l’essentiel du travail et de la richesse. Chaque jour, cette France des territoires, ou des quartiers, ou des périphéries, ou des banlieues (c’est fou ce que l’imagination langagière a pu produire en une décennie) se met en branle pour mal gagner sa vie en gagnant son lieu de travail, refaisant le soir le même trajet à l’envers. (On a également trouvé une expression pour qualifier cette transhumance : le déplacement pendulaire !) A-t-on fait des statistiques pour évaluer l’impact environnemental de ces millions de déplacements contraints ? Et c’est sur cette population que les gouvernements font peser la responsabilité du désastre écologique et du changement climatique. Peuple inconscient et égoïste qui a l’audace de refuser une taxe pour atténuer les effets d’une pollution dont il serait pourtant l’auteur !

 

Les vrais responsables

 

Rien sur les exonérations de kérosène des avions, le fuel des cargos, des paquebots, rien sur la disparition des petites lignes de chemin de fer, rien sur les sociétés d‘autoroutes que l’on vient d’autoriser à augmenter les péages et qui se goinfrent de scandaleux bénéfices, rien sur le ferroutage, les déplacements dispendieux des privilégiés qui sillonnent le monde pour leur plaisir ou l’usage inconsidéré que fait tel ministre de l’avion au prétexte que Paris ne peut se passer de lui pendant quelques heures. L’argument écologique ne vaut qu’à l’égard du peuple. On songe à Jean de La Fontaine dans « Les animaux malades de la peste », qui évoque, après que les grands fauves aient reconnu leurs crimes, l’âne qui broute d’un pré « la largeur de sa langue » et qui est ainsi traité « Ce pelé ce galeux d’où leur vient tout le mal » et que l’on condamne à mort. Face au mouvement des « Gilets jaunes » on voudrait croire à l’incompétence du pouvoir alors qu’en réalité son seul but est de trouver le moyen de calmer la colère populaire et de gagner du temps pour préserver ses intérêts de classe. Au moment où l’on pourrait croire à son engagement écologique et où il renonce au péage urbain qui aurait pu nourrir le sentiment de déclassement des territoires ruraux, il abandonne l’éco taxe sur les poids lourds favorisant ainsi le lobby du transport routier qu’il ne souhaite pas voir venir grossir les rangs des manifestants.

 

Pour le MS21 plusieurs constats s’imposent

 

Le premier est politique et concerne la rupture évidente entre le peuple (dans son acception la plus large puisqu’aujourd’hui 70 à 80% de la population est favorable au mouvement) et ceux qu’il a élus. La perte de confiance est totale comme en témoigne le refus sans appel de toute tentative de récupération que légitime le positionnement lamentable de nombreux partis y compris de gauche, et de syndicats pourtant chargés de préserver les classes populaires. Faire de cette lame de fond l’expression du rejet de l’impôt pour la disqualifier relève d’une stratégie erronée. Les gilets jaunes ne refusent pas l’impôt mais bien plutôt son caractère scandaleusement inégalitaire et c’est également la raison du fort soutien de la population majoritairement touchée par les ponctions gouvernementales et qui s’interroge en outre sur l’usage fait de ces impôts face à l’abandon des services publics. Le pouvoir macroniste n’est pas disposé à abandonner un pouce du terrain aux classes populaires. Les projets en cours le démontrent assez, qu’il s’agisse de la réforme des retraites, du déploiement des traités internationaux de libre-échange ou des cadeaux fiscaux aux plus riches dans le budget 2019.

 

Le MS21 appelle les représentants élus, politiques, syndicaux, associatifs, à se ressaisir et à soutenir un mouvement qui revendique la justice sociale.

 

Par ailleurs, l’auto-organisation des gilets jaunes révèle l’épuisement des institutions de la Cinquième République et la nécessité pour le MS21 de s’engager et de promouvoir une démarche constituante afin de rétablir une organisation démocratique dans une France souveraine. La souveraineté nationale et populaire ne pourra s’exercer vraiment que lorsque la France aura retrouvé son autonomie monétaire et financière. A cette condition seulement elle serait en mesure de répondre aux demandes des gilets jaunes. Dans les semaines qui viennent nous allons entrer dans la campagne des européennes ; le MS21 veut utiliser cette séquence pour dénoncer la mondialisation néolibérale et l’économie de marché génératrice de chômage et de concurrence déchaînée.

 

Enfin, les médias dans leur immense majorité tentent de disqualifier ce mouvement. Qu’un groupe de gilets jaunes se livre à des comportements scandaleusement racistes et xénophobes, les journalistes mettent l’accent sur l’événement et, dans la foulée, font que c’est sur l’ensemble des manifestants que pèse la réprobation. Rien d’étonnant : pour les médias, on le sait, le peuple est par nature inculte, primitif et…raciste.

 

Conclusion provisoire

 

Quand les gilets jaunes, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes – beaucoup de femmes- dénoncent leurs conditions de vie et de travail, quand ils s’engagent dans un mouvement de masse dans des conditions très éprouvantes ils font apparaître en pleine lumière la réalité insupportable d’une société de classes de plus en plus inégalitaire, qui a ses chiens de garde. Ils ont droit à notre respect et à notre soutien. Refuser de voir cela ou tenter de disqualifier ce mouvement est une faute, moralement, socialement et politiquement.

 

Pour en savoir plus :

 

 Classes dominantes et salariat : http://www.ms21.org/index.php?titre_article=329&categorie=34

 

Classes dominantes et chômage : http://www.ms21.org/index.php?titre_article=330&categorie=34

 

 

 

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M
Dénoncer la mondialisation néolibérale --l'immondialisation-- pendant la campagne des européennes? En présentant ou en soutenant certaines listes ou en appelant à l'abstention? Face à cet attrape-couillons, pseudo démocratique, servant en fait à cautionner l'existence de l'UE et de ses institutions, nous ne disposons que d'un seul moyen d'ébranler un peu plus cette "construction européenne", faite pour imposer le droit des actionnaires à disposer des peuples: une immense abstention.<br /> Méc-créant.
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R
Excellent article. Je ne connaissais pas votre mouvement. Mais j'ai une question : en quoi vos arguments, votre ébauche de programme, sont-ils si différents de ceux de LFI... je vous rappellerai que le programme "l'avenir en commun" concernant l'Europe à un plan A et un plan B qui est d'en sortir.<br /> Ne pensez vous pas qu'un mouvement comme le votre, après d'autres, affaiblit la "gauche de gouvernement" (évidemment le PS n'en fait pas partie) ? éparpille les voies du peuple de gauche, pour le plus grand bonheur de notre classe dirigeante ?... bien à vous.
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M
Merci de nous avoir répondu. Pour mieux connaître notre mouvement vous pouvez consulter notre site : http://www.ms21.org/accueil2.php<br /> Nous avons soutenu la candidature de JLM aux élections européennes mais tout en critiquant sa stratégie vis à vis de l'UE. Le plan A ne peut fonctionner puisqu'il faut l'unanimité des 27 membres pour modifier les traités alors pourquoi ne pas appliquer d'emblée le plan B, c-a-d sortir de façon unilatérale de l'UE ? Les mouvements comme le nôtre n'affaiblissent pas car nous faisons avant tout de l'éducation populaire et nous rejoignons toujours les luttes lorsqu'elles sont justes.
G
Merci pour cet excellent support argumentaire
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M
Merci pour vos encouragements, continuons le lutte !
D
c'esr certain au départ, ce type de mouvement a surpris, surtout que de tels mouvements ont déjà eu lieu, menés par la droite sinon pire, quand ce n'est pas le patronat (le 7/9/2000, à propos du carburant aussi...), quand il s'agit de l'impôt, d'autant que les médias donnent rarement la parole à des cégétistes ou communistes lors d'un mouvement social. Alors, il est normal qu'au départ il y ait eu une méfiance, d'autant que certains affichages (Miguet) maintenaient l'ambiguïté. Mais après ce premier temps, à la vue de la nature du mouvement, le courant est repassé. La manif des chômeurs de samedi dernier a rencontré un groupe de Gilets Jaunes à Bastille, où les choses se sont bien passées, avec des discussions et explications, ce qui est positif pour la suite des choses...
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M
Oui au début il a eu méfiance et hésitations mais aujourd'hui le mouvement s'étend au delà de nos frontières et entraîne toutes les catégories de citoyens ( agriculteurs, routiers, lycéens, ambulanciers, etc ). Il semble que les gilets jaunes sont là pour durer...
G
Je suis tout à fait d'accord avec votre analyse, à laquelle il manque quand même le volet "UE" ...A savoir : la politique de la France est maintenant en grande partie décidée à Bruxelles. Et l'UE ( cette UE là...) est le bras armé du néolibéralisme. Donc je m'interroge sur les moyens qui permettraient de ne plus être soumis au néolibéralisme....
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M
On ne peut dans un même article aborder tous les sujets et effectivement le "volet UE" n'est pas traité ici. Mais nous sommes pour la sortie de l'UE, de l'euro du néolibéralisme et de l'OTAN. Allez sur notre site (http://www.ms21.org/accueil2.php) vous y trouverez des analyses concernant ces sujets. merci pour votre commentaire.
T
Je partage totalement votre point de vue.
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M
Merci pour votre message qui fait du bien. Vous nous encouragez à continuer la lutte.
P
Merci! enfin un vrai texte... de gauche!
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M
Merci pour votre message d'encouragement. Oui nous continuons à défendre une vraie gauche. L'effacement du clivage gauche/droite revient à vouloir faire disparaître la lutte des classes, ce qui est une grave erreur politique. On peut changer les mots mais c'est plutôt artificiel...la gauche, la droite sont des mots gravés dans l'Histoire que tout le monde comprend même si certains s'emploient à les détourner de leur sens originel.