Mythe et réalité du droit du sol français
Le projet gouvernemental de restriction du droit du sol comme mode d’acquisition de la nationalité française, annoncé en réponse à la crise migratoire de Mayotte offre une nouvelle occasion aux extrémistes de bords opposés de s’entendre, pour s’affronter et dévoyer le débat public à ce sujet. L’histoire du droit du sol français dit pourtant bien autre chose que leurs affirmations fallacieuses de la place qu’il a occupée dans notre droit de la nationalité, des objectifs visés par ses législateurs successifs et de l’évolution des contextes de tous ordres qui lui ont longtemps assuré un consensus national, actuellement remis en question par celui d’aujourd’hui, sans que l’on en interroge les raisons primordiales.
- Droit du sol et du droit du sang : une complémentarité historique
Le droit du sol, rappelons le, est celui qui attache l’attribution de la nationalité d’un Etat à une personne au fait d’être née sur son territoire et parfois en plus d’avoir des parents qui y sont également nés (on parle alors de « double droit du sol »). Il a pour racine le droit féodal qui faisait du lieu de naissance des serfs le déterminant à vie de la sujétion de leur personne au seigneur qui en avait la propriété. Sa fonction originelle fut donc celle de l’asservissement des serfs aux seigneurs jusqu’au XVI ème siècle, puis de l’assujettissement des habitants du royaume de France à son roi, autant ne pas l’oublier. Conservé par la Révolution, il a alors évidemment changé de fonction en conférant à ceux qui étaient nés et vivaient sur le territoire national les droits et obligations de citoyens libres et égaux en droit ainsi que leur appartenance à la nation française avec tout ce que celle-ci impliquait comme soumission de leur part aux règles et valeurs de la Révolution pour ne pas être déchus de ces droits, comme l’ont appris à leur dépens les émigrés de Coblence.
A l’inverse, le droit du sang (ou de la filiation) attache l’attribution à une personne de la nationalité d’un Etat à celle de ses parents, quel que soit son lieu de naissance.