Démocratie libérale ?

Publié le par MS21

Chute du mur de Berlin

Chute du mur de Berlin

 

Après la chute du mur de Berlin, le 9 Novembre 1989, célébrée dans le monde comme la victoire de la démocratie sur l’autoritarisme étatique l’idée de la fin de l’histoire a été théorisée par le politologue américain Francis Fukuyama. Universitaire travaillant au Département d’Etat à Washington il publie en 1989 un article qui prophétise « l’universalisation de la démocratie libérale occidentale comme forme finale de tout gouvernement humain » ce que l’on a nommé par la suite « la fin de l’histoire »,  les sociétés humaines ayant atteint la plénitude parfaite de leur développement, « la forme finale de tout gouvernement humain ». Dans les années qui vont suivre on verra que les deux termes majeurs de la formule « démocratie libérale » vont prendre une signification particulière dont on mesure aujourd’hui dans un pays comme la France le caractère antinomique voire l’incompatibilité.

 

L’individu…

 

Il nous faut revenir sur les « petites phrases » d’Emmanuel Macron. Bien plus que s’indigner de leur caractère méprisant et provocateur il faut se pencher sur ce qu‘elles révèlent de l’homme et de sa vision du monde. Citons-en quelques unes :

  • « La meilleure façon de se payer un costard c’est de travailler »

  • « Je n’aime pas ce terme de modèle social » 

  • « Si j’étais chômeur je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essaierais de me battre d’abord »

  • « Je dis aux jeunes : ne cherchez plus un patron, cherchez des clients »

  • « Le chômage de masse en France c’est parce que les travailleurs sont trop protégés »

Toutes ces formules ne sont pas le fait d’un individu choyé par la vie, ignorant de la réalité du monde, dépourvu de toute forme d’empathie à l’égard de ses semblables et qu’un petit supplément d’âme suffirait à guérir. Traduites en langage clair toutes sont révélatrices d’une certaine vision de la société, de l’économie, de la démocratie et de leurs rapports avec les êtres humains, du rapport des êtres humains entre eux et du rapport de chacun à soi-même.

Lorsqu’en 1985 fut créé le statut d’entreprise unipersonnelle beaucoup s’esclaffèrent. Quoi ! une entreprise avec un seul acteur, un seul associé, à la fois patron et salarié !... Et pourtant, il n’y avait pas là de quoi rire.

Ainsi, chacun ne dépendant plus que de lui-même ne dépend plus des autres et tous entrent en concurrence avec tous dans un monde où les normes, les règles, les statuts doivent être peu contraignants pour ne pas entraver la sacro sainte liberté, un monde où chacun dispose d’un capital propre à savoir lui-même. Libre à lui d’en faire un bon ou un mauvais usage, libre à lui de « traverser la rue  » s’il veut manger. Et s’il est horticulteur, qu’il devienne livreur de pizza, nécessité fait loi ! Mais dans le même temps cette liberté lui enjoint de ne pas recourir au chômage. Pourquoi ceux qui « librement » refusent l’effort ou refusent de renoncer à la profession pour laquelle ils ont été formés devraient-ils être protégés ?

Partant on comprend que les adeptes du système refusent un modèle social fondé sur la notion de solidarité parce que la solidarité ne peut avoir cours dans une société régie par un système d’économie libérale  mondialisée telle que la nôtre.

 

L’Etat…

 

Liberté donc mais également concurrence et rentabilité. Le rôle de l’Etat dans un tel système est de tout faire pour en favoriser l’épanouissement. Croître, investir, rentabiliser tel est le credo auquel vont donner corps les dirigeants. C’est ce que l’on appelle aujourd’hui la gouvernance, en d’autres termes la gestion de l’Etat soumise aux lois de l’économie. Là où jadis prévalaient des considérations d’intérêt général et des préoccupations d’ordre social on ne parle plus que d’évaluations, applications, recommandations à partir de programmes ayant pour seul objectif de répondre aux exigences du système économique ordo-libéral. Le langage des acteurs politiques et de la quasi totalité des commentateurs appointés en est un puissant révélateur qui même lorsqu’il traite de sujets éminemment sociaux comme l’école, la santé ou la préservation des espèces ne le fait qu’à partir du prisme financier et de la rentabilité économique. Il suffit de les écouter pour en avoir la confirmation.

 

La démocratie

 

Quand les lois de l’économie libérale s’imposent, le rôle et les choix de l’Etat en découlent et vont devenir la règle privilégiée pour tous ceux qui sont à sa tête. Les citoyens qui croient déléguer le pouvoir à des représentants sont dépossédés de toute possibilité d’orienter les choix qui influencent leurs existences.

Les gagnants de ce système adhèrent « naturellement » à l’idée que leur situation est légitime et méritée. Les perdants, les plus nombreux, ne se reconnaissent plus dans le fonctionnement d’institutions prétendument démocratiques ni dans une société dans laquelle les inégalités prospèrent, où le bien commun et les solidarités sont jugés archaïques et préjudiciables au bon fonctionnement de l’Etat.

Le pouvoir actuel ne peut tolérer une remise en cause des fondements du néo libéralisme. L’atteinte aux libertés, le déni démocratique, accompagnent obligatoirement la mise en œuvre de sa politique dès lors qu’elle apparaît contestée et l’autoritarisme tend de plus en plus à devenir un totalitarisme ce que démontrent les événements de ces derniers mois.

Ce que font Emmanuel Macron, son gouvernement, les élus LREM est profondément anti démocratique. En cela ils ne sont pas les seuls. L’hégémonie du capitalisme néo libéral mondialisé tend à substituer partout les lois de l’économie au droit démocratique et l’Union européenne en a fait son cheval de bataille. Pour atteindre cet objectif, elle peut compter sur les députés  européens de LREM à coup sûr ses plus fidèles alliés.

C’est dans la nécessaire contestation de ce système que le peuple retrouvera le sens de l’appartenance collective et des valeurs de solidarité qui ont fondé la démocratie. Il devra pour cela se réapproprier sa souveraineté nationale et populaire. C’est la voie que nous montre le mouvement des gilets jaunes

 

Publié dans Education populaire

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